Récit d’une expérience Rotarienne Internationale

lundi 26 septembre 2011
Appartenir à la famille du Rotary est à la fois une chance et un privilège. Certes, répondre aux critères des quatre questions n’est pas ma prière matinale mais au cours de certaines de mes réflexions et de mon vécu quotidien, je réalise que malgré toutes les vicissitudes auxquelles l’homme moderne est confronté, la générosité, l’espoir, la lutte contre la résignation font aussi partie de la nature humaine. Et le Rotary est aussi là pour me le rappeler. Outre les contacts privilégiés entre chacun de nous, son action locale et régionale, un deuxième privilège m’a été échu de concrétiser un idéal de servir le Rotary au travers de son action internationale. Grâce aux liens rotariens qu’avait tissés notre ami Henri Gard avec le club de Bormes-les-Mimosas – Le Lavandou, l’opportunité nous a été offerte à Henri et moi-même de nous rendre en Côte d’Ivoire en 1995 et 1996 pour participer activement à une campagne d’éradication d’une maladie infectieuse nommée le Pian. Il s’agit d’une forme de syphilis de la peau se rencontrant dans les zones rurales d’Afrique tropicale mais également d’Amérique latine, d’Asie du Sud-est et d’Océanie, favorisée par les grandes chaleurs, l’humidité, le manque d’hygiène et la promiscuité. Elle est transmise par contact cutané avec des personnes infectées et touche préférentiellement les enfants entre 2 et 5 ans. Les localisations les plus fréquentes sont les jambes et les fesses. Les lésions sont de type ulcérations parfois délabrantes pouvant atteindre les os voire d’autres organes. Le décor est planté.

Après un accueil qui fut à la hauteur du pays que nous visitions, haut en couleur et d’une extrême gentillesse, nous voilà partis en 4x4 dans la brousse africaine direction Aboisso, Bouaké et Yamoussoukro. Accompagnés de rotariens ivoiriens et d’infirmiers des dispensaires de brousse, après les protocoles de réception chers aux villages africains, de longues colonnes d’enfants avec leurs mères drapées de tissus multicolores se présentent devant nous, davantage intrigués par la couleur de notre peau que par la manipulation de seringues remplies de Pénicilline qui vont définitivement les débarrasser de leur souffrance. Le tri ne doit pas s’éterniser. Notre but est de traiter le maximum d’enfants. Henri a de la peine à suivre avec l’enregistrement administratif des petits malades dont l’organisation frise le chaos. 400 à 500 injections quotidiennes sous un soleil de plomb souvent dans une atmosphère nauséabonde, le défi est de taille mais notre mission est accomplie. Le soir, éreinté mais peinant à trouver le sommeil, excité par la joie de servir inconditionnellement mais surtout de partager des moments d’intense émotion avec de Nouveaux Amis rotariens, charismatiques au dévouement sans borne, la parole du Dr Albert Schweitzer titille mes neurones et ne fait qu’exacerber ma motivation à poursuivre cette action « Servir est un privilège que l’on recherche, pas un fardeau que l’on cherche à éviter ».

Le plan éradiqué en Côte d’Ivoire, une nouvelle mission devait se poursuivre dans les pays voisins notamment le Togo et le Bénin. Malheureusement les propositions de nos amis français jumelés avec le club d’Abidjan n’ont pas trouvé écho auprès des gouvernements des dits pays davantage préoccupés par les moyens financiers et la logistique médicale mise à disposition que par notre présence active sur le terrain. Malgré l’obstination des rotariens locaux rien n’y fit et énorme fut notre déception. Que faire contre des décisions gouvernementales où règne une monarchie totalitariste dénuée de tout principe éthique et de toute valeur fondamentale ?

Démissionner ne se conjugue pas dans la langue du Rotary. Unissons nos forces intérieures et comme l’union fait la force alors le Rotary aura atteint sont but suprême : l’engagement pour la paix entre les hommes et la solidarité entre les peuples.

Patrick Vouilloz